Rencontre avec Jacques Loustal

Rencontre avec Jacques de Loustal
à l'occasion du vernissage de l'exposition Esprits d'ailleurs à la Médiathèque du Mans,
le 5 juin 2015
Interview publique animée et retranscrite par Agnès Deyzieux

photo ©Stéphane Mahot

Voilà plus de trente ans que vous travaillez dans le domaine de l'image, en tant qu'auteur de bande dessinée, illustrateur de romans et de livres pour enfants, publiciste, peintre, photographe... Qu'est-ce qui vous pousse dans toutes ces directions ? Est-ce que toutes ces activités nourrissent également votre travail et votre univers ?
J’ai toujours dessiné comme les enfants et je n’ai jamais arrêté ! Peut-être parce que j’étais le petit dernier d’une famille et que j’étais plus isolé des autres, en terme d'âge. Donc, j’avais cette activité du dessin et je n’ai jamais arrêté sauf peut être quand j’ai passé mon bac. J’ai tout de suite envisagé un métier dans lequel le dessin avait une place importante. Mais je ne pouvais pas imaginer, même par rapport à ma famille, être peintre ou faire les Beaux Arts. C’est pour cela que j’ai choisi de faire architecture, un métier respectable mais dans lequel le dessin a beaucoup d’importance. J’ai commencé en 1973 ces études qui étaient très ouvertes à l’époque sur des tas de domaines. C’était aussi une époque bénie pour la bande dessinée : toute une révolution s’opérait, c’était la fin de la bande dessinée uniquement pour les adolescents et l’émergence de Métal Hurlant, de A suivre, de l’Echo des Savanes. Je dessinais dans des fanzines alors. Il y avait aussi beaucoup de journaux qui publiaient des histoires courtes où on pouvait faire ses gammes. J’ai commencé avec des illustrations, des petits dessins légendés. Mais ce qui se passait dans la bande dessinée m’a donné envie de m’y essayer ! et puis bien sûr, des rencontres, celle avec Philippe Paringaux, celle avec de grands dessinateurs…Tout cela a a créé un effet boule de neige qui a débuté quand j’étais encore étudiant. Peu à peu, j'ai eu assez d’histoires pour faire un album, puis un deuxième…C’est lent, progressif et parallèle à mes études qui ont du coup duré 8 ans au lieu de 6 ! J’ai terminé surtout pour éviter d’aller en caserne, je suis parti comme architecte en coopération au Maroc pendant un an et demi. Le voyage m’a toujours attiré, l’environnement étranger, la mer… et du temps pour dessiner !


Dans votre parcours d’homme créateur d’images, qu'est ce qui vous a influencé ou stimulé? La bande dessinée, le cinéma, la peinture ? Dans l'album Barney et la note bleue, vous faites des références directes à David Hockney par exemple.
Mon activité principale au début était la bande dessinée et quelques dessins d’illustrations dans Rock & Folk ou Métal Hurlant. C’était l’époque de la ligne claire, des auteurs comme Yves Chaland, Serge Clerc et d’autres…et moi j’avais des influences très opposées, des peintres plutôt solaires comme Gauguin, Hockney, Matisse et aussi des artistes du mouvement allemand Grosz, Beckmann. Dans la bande dessinée, que je revendique toujours, il y avait Hergé, la seule lecture que j’avais enfant et que je peux toujours reprendre avec beaucoup de plaisir. Il y avait Crumb, Moebius, des gens que je côtoyais à l’époque. Des gens qui font que, quand j’ai ouvert le premier numéro de Métal Hurlant à l’époque, je me suis dit : le monde a changé, on peut faire ça, on n est plus obligé de dessiner des histoires de scouts, de pirates ou de cowboys ! La bande dessinée devenait un vrai mode d’expression. J’ai mis beaucoup plus de temps à trouver mon style, parce que j’avais toutes ces influences diverses. Par rapport à mes amis qui sont très vite devenus connus car ils étaient balisés sur des choses déjà définies et qu'ils faisaient cela très bien. Chaland, c’est un virtuose mais il n’a pas inventé son trait ; Swarte, de même. Ils étaient directement inspirés par des gens qui avaient déjà mis au point un alphabet graphique. Ce qui tombait bien à l’époque, c’est qu’il y avait beaucoup de revues et on faisait des histoires courtes. Du coup, dans mes deux premiers albums, il y a de tout et n’importe quoi ! Des trucs avec des hachures, des fois où je supprime le trait, d’autres au crayon de couleurs, c’est très libre !
 
Ce qui a été perçu comme votre marque de fabrique, ce sont ces textes placés au-dessous de vos dessins, cette voix off qui est privilégiée. Pourquoi avoir fait ce choix ?
J'avais un goût pour l’image légendée. C’était ce que je regardais quand j’étais petit dans les vieux livres, ces grandes images où le texte figurait en dessous. Et puis la rencontre avec Philippe Paringaux qui écrivait des nouvelles auxquelles j’étais très sensible. Il avait arrêté cette rubrique et je lui ai proposé de continuer sous forme de scénarios de bande dessinée. Ça a été une rencontre très fructueuse, on a fait énormément de livres ensemble. Et j’ai toujours plaisir à relire ses textes. Cela a commencé ainsi : je lui ai apporté une histoire, que je n’avais pas inventée - -moi, je n’invente jamais d’histoire ! C’était une histoire que j’avais adaptée de Vernon Sullivan (patronyme de Boris Vian) très américaine que j’ai transposée dans un autre univers. Il avait bien aimé et comme tout rédacteur en chef qui sait faire du rewriting, il a réécrit ce récit. Et quand il m’a montré son texte qui était admirable par rapport à ce que j’avais écrit, j’ai dit bon ok ! A partir de ce jour là, je ne ferai plus que de la bande dessinée. On avait beaucoup d’affinités, on parlait le même langage, on avait le même goût pour les choses. On nous a mis l’étiquette de « bande dessinée littéraire. » C’est vrai que Paringaux, Charyn, Coatalem, ce sont des gens qui écrivent, ils ne font pas juste des dialogues. Pour moi, c’est très important la musique du texte, le style. Quand je fais un dessin et que j’écris un texte bien ciselé en dessous, c’est tout ce que j’aime ! Mais il y avait toujours quelqu’un, dans les prix ou les jurys de type Angoulême, pour dire, ah, ce n’est pas de la bande dessinée ! Peut-être est-ce plus proche de ce qu’on appelle maintenant le roman graphique tout en ayant le format d’un album de bande dessinée…
 
Vous avez illustré les romans de Georges Simenon et collaboré avec de grands écrivains comme Tonino Benacquista ou Jérôme Charyn,... Quelle est la collaboration ou le livre réalisé qui vous a le plus marqué ?
Les plus marquants pour moi, c’est ceux avec Paringaux, en particulier le dernier Le Sang des voyous. Sur celui là, il y a eu une vraie collaboration sur l’écriture. C’était un roman inachevé que j’ai retrouvé dans ses tiroirs. J’ai fait tout le découpage et lui, il a écrit son texte à partir de ce découpage. Il s’est tellement laissé aller à écrire que je n’avais pratiquement plus la place de dessiner ! Plusieurs fois, je lui ai dit qu’il y en avait trop. Du coup, à la fin, il est arrivé à l’os du texte et  il était très content du résultat. C’était une bonne collaboration pour une histoire au final tragique !

Venons-en à votre goût pour le voyage et pour le carnet de voyage. Comment cet intérêt est né ?
Le voyage était très présent dans mon environnement familial. Mon père était militaire et aviateur, il voyageait beaucoup. Je le voyais toujours revenir de tel ou tel endroit. Il y avait aussi beaucoup de littérature de voyage à la maison. J’avais aussi le goût des cartes et des atlas, le fait de pouvoir mettre le doigt sur une carte en sachant à quoi ça ressemble précisément. Toutes ces raisons ont fait qu’à un moment, le voyage, c’était presque un devoir pour moi ! Le fait de tout voir, de connaître le monde !

Et le goût pour le carnet de voyage ?
Les premiers carnets que vous voyez, c’est du pur dessin de contemplation, c’est le plaisir du voyage. Les premiers ont été réalisés dans des îles en Méditerranée, par goût de la mer, des paysages marins.... Quand on arrive sur une île, on en fait le tour puis on se pose et là, vient l’envie du dessin. C'était lié à l'endroit où je pouvais m'assoir plus qu'au sujet, c'était le moment que je voulais traduire. Ça a donné lieu à beaucoup de carnets emplis de dessins contemplatifs. J'ai été publié par Futuropolis. Ca a créé un effet boule de neige. J'ai continué à en faire. Quand je voyageais, l'idée était aussi toujours de ramener des images. Après, j'ai eu des commandes de reportage pour Géo ou Senso. C'était formidable, j'ai fait de très beaux voyages où je partais un peu comme un photographe. Après, il y a eu ce système d'invitations des instituts français à l'étranger qui ont une programmation culturelle et qui invitent des auteurs en résidence. Dans ce cadre là, j'étais invité une quinzaine de jours. Je dessine sur place ou à mon hôtel en regardant mes photos. Et, il y a une exposition des dessins la veille de mon départ.

Et dans ce cadre là, ces contraintes de rapidité ou de délai vous ont-elles amené vers des pratiques ou des techniques sur vous n’auriez pas choisies spontanément ?
Oui, car il ya des choses qui sont faites in situ ou le soir à l'hôtel mais toujours avec des techniques rapides. Tous ces dessins du Vietnam sont réalisés à la plume et ce sont des choses que j'ai vues dans la journée. J'aime bien aussi utiliser les produits locaux, la papeterie, surtout en Asie, les pinceaux , les encres locales. Le fusain aussi est une technique que j'aime beaucoup et qui est assez rapide. Par contre, tout ce qui est en couleur, c'est du travail d'atelier. J'apprécie aussi les techniques élaborées ! J'ai trop vu ou trop fait des carnets de voyage avec trois coups d'aquarelle un peu pâles, ça ne me plaît pas.
Lavis et encre de chine, Dessins d'ailleurs
On voit un aperçu de l'éventail très large de techniques que vous utilisez avec ces cinq cartes postales éditées par la médiathèque. Pouvez-vous nous décrire ici les différents moyens employés ? Et nous dire ce qui motive le choix de la technique que vous allez employer :  est-ce en fonction du sujet, du rendu ou de vos envies ?

Alors ce dessin, qui est l'affiche de l'exposition d'ailleurs, je m'en souviens très bien. C'était dans un petit village des régions des missions jésuites en Bolivie. Je me promenais, j'aperçois une porte entrouverte et je regarde. Je vois cette petite scène, un moment très fugitif, je fais un croquis ou une photo, je ne me souviens plus. Et le soir, je regarde l'image pour bien me remémorer les détails. Puis, je fais un dessin assez rapide sur mon carnet, un dessin au crayon spontané, léger. Quand je rentre à Paris, je fais une photocopie de mon carnet. Ce que vous voyez là, c'est une aquarelle sur la photocopie d'une page de mon carnet avec une mise en couleurs très lâchée ! C'est la technique la plus fréquente que j'utilise pour mes dessins de voyage.
Polynésie, Esprits d'Ailleurs
Pour celui là, c'est la même chose. Bora Bora, fait partie des grands voyages que j'avais très envie de faire. Pour le chien, j'ai utilisé une photo parce que je trouvais cette attitude intéressante, exacte et pour ne pas toujours dessiner de la même façon. C'est des moments où on voit bien qu'on allie le plaisir du dessin et le plaisir d'être là. J'aurai bien passé une petite année à cet endroit là !

Et cette image de Constantine ?
Encre sépia. Algérie, Esprits d'Ailleurs

C'était dans le cadre d'une résidence à l'institut français de Constantine. Je savais que je devais tout dessiner sur place et que je ne pourrais pas trop dessiner dans la rue. Donc, je dessinais dans l'hôtel à partir de mes photos. J'ai essayé une encre que je n'avais jamais essayé, une encre sépia, un peu laquée. J'ai fait aussi beaucoup de dessin au crayon et au fusain. Dans ce cadre là, on a une liberté totale de technique et de subjectivité. J'ai réutilisé cette technique à l'encre pour des dessins en Utah. Comme vous le voyez, c'est très bien adapté aux images solaires.

Aquarelle et encre de chine. Maroc, Dessins d'Ailleurs
On perçoit certains motifs récurrents dans vos images : les grands espaces désertés, les granges plus ou moins abandonnées, les îles et les étendues d'eau, les carcasses de voiture, les animaux comme les chiens qui passent ou qui dorment et les poissons dans l'eau ou dans l'assiette. Ce sont pour vous des thèmes particulièrement suggestifs, évocateurs ou obsessionnels ?
C'est très évocateur selon mon goût ! Je lisais dernièrement une interview de Luz où il disait qu'il passait son temps à dessiner des gens qu'il haïssait. Moi, je ne dessine que des choses qui m'attirent ! J'aime les chiens errants dans les villes d'Afrique, ça rajoute une petite présence. Je suis fasciné par le monde animal... les oiseaux, les poissons ! Dès que je suis au bord de la mer, je vais voir les pêcheurs, les marchés, je regarde toutes ces formes incroyables qu'on tire du fond de la mer ! Mon ami Ferrandez fait beaucoup de portraits de gens. Moi, j'ai beaucoup de mal à rester devant quelqu'un. Je fais plutôt des scènes d'ambiance avec des silhouettes.
 
Aquarelle. Polynésie, Esprits d'Ailleurs
Dans vos images, il y a plus qu’une évocation des lieux. Bien sûr, il y a une réalité du paysage, de ce qui est représenté mais aussi un aspect très onirique. On a parfois l'impression d'être dans les images d'un rêve, dans des images mentales. Cette sensation d'étrangeté est probablement due à la composition même de l'image. Avez-vous travaillé cet aspect de votre style volontairement ou est-ce que cela est venu un peu tout seul ?
C'est venu comme ça, c'est ma façon de voir les choses. Je fais aussi beaucoup de photos. Quand je me promène dans une ville ou un paysage, il y a un moment où quelque chose se passe, un équilibre avec les pleins, les vides, les lignes. Là, je fais la photo. Si je fais un mètre de plus, je ne vois plus la même chose. C'est pourquoi j'aime beaucoup les photographes, chacun avec son oeil, son regard. J'aime cet aspect subjectif. Je viens de faire un voyage avec Raymond Depardon et on va faire un livre ensemble de regards croisés sur la Colombie. Moi, j'avais toute liberté dans l'organisation de mon travail alors que lui ne pouvait travailler que le matin ou le soir pour des raisons de lumière. Pour moi, la photo est plutôt comme un bloc note qui m'aide à composer des images. Et le dessin nous permet de supprimer des éléments ou de faire des mises en scène.
Costa Rica, Dessins d'Ailleurs
Comme avec cette image du crocodile où l'on sent aussi ce plaisir de mise en scène ?
Oui, sauf que je l'ai vraiment vu ce crocodile passer dix minutes avant !


A coté d'images poétiques ou contemplatives, il y a des images quasi narratives ou humoristiques, avec comme des symboles ou des énigmes à décrypter, où une histoire cachée peut se lire. Je reviens à cette image de Polynésie : un homme que l'on voit de dos et dont on suit le regard pensif vers  deux femmes sur la plage, avec en avant plan, une assiette d'arête de poisson et le chien qui nous regarde de biais. On peut imaginer des tas de relations possibles entre tous ces personnages : pourquoi les femmes ont laissé l'homme seul, les canettes vides à son côté prouvent qu'elles étaient assises là avant. Est-ce qu’ils se sont disputés ? L'assiette avec les restes de poisson est-elle celle du pêcheur qui est reparti sur son bateau pour approcher les femmes peut-être ? On peut imaginer des tas de scénarios. Y a-t-il une volonté particulière de jouer, de stimuler l'imaginaire du spectateur ou est ce totalement anodin pour vous ?
Dès que je mets deux personnages dans le décor, il y forcément une tension ! Alors là, pour cette scène, c'était un type, apparemment un militaire, qui a fini son boulot, qui range son bateau et puis il y avait ces deux femmes. Et là, de dos, c'est plutôt moi ! Tout est effectivement dans la position des corps. Je dessine toujours l'environnement et après je positionne les personnages. J'ai énormément de livres de photos d'intérieur des années 30, 40, 50, genre Arts et Décoration, Plaisir de France... Ces grands salons vides pour moi génèrent une ambiance. Je les dessine et parfois avec un calque, je regarde comment je pourrais positionner deux personnages. Ça renvoie à la peinture que j'aime, celle de Balthus ou au travail du photographe Auguste Sander.
Polynésie, Esprits d'Ailleurs

Dans Dessins et Esprits d'ailleurs, peu de texte légende les images. Et quand il y en a, ce ne sont pas des textes qui situent l’endroit, ce sont plutôt des embrayeurs à l'imaginaire ou des clins d’œil au lecteur. Je pense par exemple à cette image d’Ecosse, où on voit cet homme tout petit en barque, isolé de tout, qui pêche près de son île où figure juste son château et le texte commente  "l'homme de toute évidence ne désirait pas être dérangé". Comment décidez-vous de ce texte quand il y en a ?

J'aime beaucoup quand il y a un texte et un rapport de texte / image. Quand je fais un dessin, j'aime trouver la phrase qu'il faut ! Je suis très dans la forme, penché sur mon dico des synonymes. C'est un plaisir de l'écriture auquel je m'essaie... Alors, avec mes carnets de voyage publiés au Seuil, il y avait un système de maquette qui laissait beaucoup de blanc. J'étais obligé de mettre du texte et parfois sur des images où je n'avais rien à dire ! Du coup, à la Table Ronde, on est parti sur cette maquette, plein pot avec juste quelques respirations où on peut mettre du texte. Du coup, il y en a moins et il est plus travaillé. Mais je pense qu'il n'y en a pas assez ! Les gens aiment s'arrêter sur le texte. Je pense que la prochaine fois, j'en mettrai plus !
 
Huile sur toile. Navajo Poker
Un mot également sur ces peintures grand format que vous avez choisies pour cette exposition où l'on retrouve votre goût pour les îles. Qu’est-ce que la peinture grand format vous apporte ? Une plus grande amplitude du mouvement, un regard plus large ?
Huile sur toile. Lanzarote
Comme je suis uniquement dans le domaine de l'image, il est naturel que j'ai envie de me confronter à d'autres matériaux. Au début, mes bandes dessinées, c'était de l'encre de chine et de l'aquarelle. A un moment, j'en ai eu assez de la transparence, j'ai fait tout un travail de pastel à l'huile. Il y a un côté autodidacte dans tout ça que j'aime assez. Car il faut comprendre que je n'ai aucune formation artistique. J'ai fait les Beaux Arts en architecture, et on y apprend peu sur le dessin. Quand je voyage, j'aime bien aller voir les peintres dans leurs ateliers, les gens de l'art populaire, en Afrique, au Mexique, au Vietnam, au Pérou.. Je me suis donc confronté au grand format, à la couleur pâteuse plutôt que liquide, les opacités. Et j'y ai pris goût mais ça m'a pris beaucoup de temps ! A présent, j'ai fait suffisamment de peinture pour qu'on regarde. Quand je pense à une image que j'ai envie de faire, je sais si ce sera un fusain, une aquarelle, une peinture. Certaines des peintures qui sont là viennent de croquis que j'ai faits en voyage, celles en Utah par exemple. Ce qu'il y a de douloureux et d'excitant pour moi, c'est que quand je commence une peinture, je ne sais pas quoi cela va ressembler. La peinture vous guide. Au final, quand je regarde, je me dis que ce n'est pas forcément ce que je pensais faire ! Mais ce travail est stimulant. Je me donne par exemple l'idée de travailler sur une série pour une exposition qui aura un thème. Récemment, j'ai retravaillé des grands formats avec une autre technique avec un rendu très différent : des fixés sous verre. D'abord, vous peignez le noir à l'envers, après on met les couleurs en aplat, on signe aussi à l'envers ! Quand on retourne, la peinture est sous le verre. Mais il y a des techniques vers lesquelles je sais que je ne me risquerai pas comme le pastel sec ou la carte à gratter, qui demandent beaucoup de maîtrise. 
Fixé sous verre
Reviendrez-vous à la bande dessinée ?
Oui bien sûr, j'en fais une actuellement ! Quand on vient du dessin narratif, on ne peut pas rester à tourner en rond dans son atelier autour de peintures ! Donc ici, il s'agit d'un projet avec Jean-Claude Götting qui s'appellera Black Dog, une histoire très américaine.
Ce que j'aime dans la bande dessinée, c'est la mise en scène qui la rapproche du cinéma. On me donne un texte, je fais le story board et après l'écrivain écrit en fonction de mon découpage. Toute cette partie du découpage, des séquences; des cadrages, comment éclairer, comment passer d'une scène à l'autre m'intéresse.. Ce sont les mêmes questions qu'un cinéaste se pose. Si j'avais fait des études de cinéma, j'aurais aimé être chef opérateur !



Grand merci à Jacques Loustal pour cette interview !
Retrouvez plus d'images sur son site.

Merci à la Médiathèque pour son accueil.
L'exposition qui compte une cinquantaine d'originaux est visible à la Médiathèque du Mans jusqu'au 29 Août 2015.
Merci à Stéphane pour les photos ! 
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